Tunisie : de nouvelles taxes ciblant les riches pour se passer du prêt du FMI
Tunis avait signé en octobre 2022 un accord préliminaire avec le FMI sur un programme d’aide de 1,9 milliard de dollars. Mais les discussions sont dans l’impasse, faute d’engagement ferme du pays à mettre en œuvre un programme de réformes exigé par l’institution.
Le président tunisien Kaïs Saied a estimé, jeudi 1er juin, que l’instauration de nouvelles taxes ciblant les plus riches pourrait permettre à son pays de se passer d’un financement de 1,9 milliard de dollars du Fonds monétaire international (FMI), dont il rejette les « diktats » liés à la levée des subventions aux produits de base.
« Au lieu de lever les subventions aux produits de base au nom de la rationalisation, on peut introduire des taxes supplémentaires sur les plus riches qui bénéficient de ces subventions sans qu’ils en aient besoin », a-t-il déclaré lors d’un entretien avec la cheffe du gouvernement, Najla Bouden, selon un communiqué de la présidence.
Le locataire de Carthage a également rappelé que le système de subventions aux produits de base actuellement en vigueur bénéficiait à tous les Tunisiens, y compris les plus aisés. Pour rendre ce système plus équitable, il a jugé pertinente l’idée de « prendre l’excédent d’argent des riches pour le donner aux pauvres », en reprenant une citation attribuée à l’un des premiers califes de l’islam, Omar Ibn Al-Khattab, estimant que ce mécanisme permettrait à l’État de « ne pas se soumettre aux diktats étrangers ».
Kaïs Saied avait déjà rejeté, début avril dernier, les « diktats » du FMI, qui conditionne le décaissement d’un programme d’aide de 1,9 milliard de dollars à son pays, à des réformes économiques portant notamment sur la levée des subventions aux produits de base, la réduction de la masse salariale dans le secteur public et la privatisation des entreprises publiques.
« En ce qui concerne le FMI, les diktats provenant de l’étranger et qui ne mènent qu’à davantage d’appauvrissement sont inacceptables […] Ils [les bailleurs de fonds, Ndlr.] nous demandent de les écouter. Je n’écoute que Dieu et la voix du peuple », avait-il alors déclaré.
« L’alternative est que nous devons compter sur nous-mêmes. Il faut trouver d’autres idées, car la paix sociale n’est pas un jeu ou quelque chose qui peut être pris à la légère », a ajouté le dirigeant tunisien, rappelant les émeutes meurtrières déclenchées en 1984 par l’augmentation du prix du pain.
La Tunisie avait signé en octobre 2022 un accord préliminaire avec le FMI sur un programme d’aide de 1,9 milliard de dollars, mais le décaissement de la première tranche de ce prêt n’a pas encore eu lieu, car le gouvernement ne s’est jusqu’ici pas engagé à mettre en œuvre les réformes d’assainissement des finances publiques exigées par l’institution financière multilatérale.
Tunis semble en effet redouter les tensions sociales que pourrait entraîner la levée des subventions, dans un contexte d’envolée de l’inflation, de grave crise politique et de désaccords profonds avec l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), la puissante centrale syndicale.
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