La légère reprise constatée depuis décembre et à la réouverture partielle des marchés le 2 janvier ne doit pas faire illusion. Ce répit relatif s’explique notamment par les interventions énergiques de la Banque centrale européenne (BCE), qui a injecté massivement des liquidités pour éviter que le secteur bancaire ne se grippe. La crise de la dette perdure et «peut tout emporter», a prévenu Nicolas Sarkozy le 1er décembre. «Que restera- t-il de lEurope si leuro disparaît, si le cur économique de lEurope seffondre?», a questionné le président français.
Partie de Grèce, il y a deux ans, avec la révélation brutale de lampleur des déficits publics jusque-là dissimulée, la crise de la dette a par la suite gagné le Portugal et lIrlande, pays encore considérés comme «périphériques». Mais lannée 2011 a marqué une accélération dramatique de la contagion.
Les plans de sauvetage successifs et autres «sommets européens de la dernière chance» ont échoué à ramener le calme, posant ouvertement pour la première fois la question de la survie de la monnaie commune. Désormais tous les pays de la zone euro, jusquà la France voire lAllemagne, sont menacés ( plus que 50% des allemands ont tendance de regagner leur Deusche Mark).
Depuis 2007, la crise demeure la même mais elle est protéiforme. Financière dabord, partie des Etats-Unis, puis économique avec la récession et la panique autour de lendettement, politique et sociale aussi aujourdhui.
Elle a fait chuter au moins six chefs de gouvernement sur le Vieux continent: Georges Papandréou en Grèce, Silvio Berlusconi en Italie, José Luis Rodriguez Zapatero en Espagne, Brian Cowen en Irlande, José Socrates au Portugal, Iveta Radicova en Slovaquie.
Une fois passée la «trêve des confiseurs», ce début dannée sera déterminant. Les Etats, entreprises et banques en Europe devront retourner massivement emprunter sur les marchés, dans un contexte qui risque dêtre marqué dans plusieurs pays par un retour à la récession.
Durant le seul premier trimestre 2011, ce sont plus de 300 milliards deuros (plus de 570 milliards de DT) que les gouvernements vont devoir refinancer. Les banques auront besoin de 250 milliards deuros en obligations et les entreprises du secteur non financier rechercheront 200 milliards, selon les experts du secteur.
En parallèle, la Grèce doit trouver en janvier 2012 un accord avec les banques sur une réduction de moitié de leurs créances, condition de la survie financière du pays, et les négociations se révèlent difficiles. Or, la zone euro na toujours pas financièrement les reins suffisamment solides pour se porter en même temps au secours de plusieurs pays, surtout si lEspagne ou lItalie en font partie.
Les efforts consentis pour doter l’Union européenne dun pare-feu financier suffisant peinent à se concrétiser en raison des réticences de lAllemagne à délier les cordons de la bourse. LEurope compte du coup sur un soutien du FMI qui reste incertain.
Les «euro-pessimistes» donnent dans ce contexte de la voix. Lancien commissaire européen néerlandais Frits Bolkestein estime quun «éclatement de leuro est inévitable». Le fossé est trop grand à ses yeux entre le Nord de lEurope qui croit à la discipline budgétaire et les pays «méditerranéens» qui voudraient «des solutions politiques aux problèmes économiques».
Hors de la zone euro, les banques britanniques ont été priées par leur autorité de surveillance (FSA) de mettre en place des plans de précaution pour affronter les «pires» scénarios. Aux Etats-Unis ou en Asie, des entreprises se préparent aussi déjà à la fin de la monnaie commune.
Depuis deux ans, il est vrai, la réponse européenne na pas convaincu. L’Europe a agi «trop peu et trop tard», estime lancien président français de la Commission européenne Jacques Delors.