Hamadoun Touré : « L’Afrique a le plus fort taux de croissance du secteur internet depuis 2012 »

Hamadoun Touré : « L’Afrique a le plus fort taux de croissance du secteur internet depuis 2012 »

Hamadoun Touré : « L’Afrique a le plus fort taux de croissance du secteur internet depuis 2012 »  

Le patron de Smart Africa poursuit son combat : « Principalement parce que l’internet s’utilise de plus en plus sur le téléphone portable, or l’on dénombre presque 1 milliard de téléphones portables à ce jour en Afrique. Mais ce développement de l’internet ne va pas assez loin, et les retards s’accumulent à cause tout d’abord des coûts excessifs de la “data”. On a beau dire que la classe moyenne africaine augmente, pour le panier moyen, le prix de l’internet en Afrique est exorbitant par rapport à l’Europe ou d’autres régions du monde. »

Hamadoun Touré : « Smart Africa plaide pour un marché numérique africain commun »

La conférence Transform Africa a pris fin il y a 10 jours à Kigali, au Rwanda. Autour d’une thématique : comment comment faire émerger des villes connectées africaines grâce au développement massif des nouvelles technologies sur le continent. Sur les 4.000 participants présents, un grand nombre sont venus des 18 pays africains membres de l’alliance Smart Africa, un réseau dont l’objectif est de rapprocher le secteur privé et les gouvernements africains autour du développement de l’internet en Afrique. Rencontre à Kigali avec Dr Hamadoun Touré, ancien Secrétaire Générale de l’Union Internationale des Télécommunications qui a pris la tête de l’alliance Smart Africa depuis janvier 2016 en tant que directeur exécutif et dont le conseil d’administration regroupe une dizaine de chefs d’Etat africains.

Combien de pays africains font aujourd’hui partie de l’alliance Smart Africa ?
Entre 2014 et 2017 le réseau Smart Africa est passé de 7 à 18 Etats africains membres après l’adhésion de la Tunisie qui vient de nous rejoindre et le rythme s’accélère 2016. Je vois Smart Africa non pas comme une organisation internationale classique mais plutôt comme une sorte de start-up qui grandit rapidement. Le plus grand objectif de Smart Africa est de mettre la transformation digitale au coeur du développement économique du continent, en faisant travailler le secteur privé et les Etats membres autour d’initiatives concrètes comme par exemple le projet “One Africa Network” qui vise à supprimer progressivement le roaming entre les pays africains ou le développement d’un réseau de villes africaines intelligentes.

Comment comptez-vous faire baisser le roaming et le prix des télécommunications en Afrique ?
Sous notre impulsion, le Burkina Faso, la Guinée, le Mali, le Sénégal et le Togo ont déjà adopté une mesure qui permet de mettre fin aux surtaxes entre leurs pays depuis le 31 mars 2017. C’est un immense premier pas que nous voulons dupliquer en Afrique de l’Est et petit à petit étendre sur tout le continent grâce au nombre de plus de plus important d’Etats africains qui rejoignent l’alliance Smart Africa.

Quels sont les autres ambitions de Smart Africa ?
Smart Africa veut attirer dans les 10 prochaines années environ 300 milliards de dollars d’investissements publics et privés qui seront injectés dans 3 grandes priorités d’avenir pour le numérique africain. Premièrement le renforcement des infrastructures internet en Afrique, des fibres optiques aux câbles sous-marin en passant par les satellites, le déploiement des réseaux mobiles, la création de “data centers” installés sur le sol africain, etc. La seconde priorité consiste développer le contenu africain exportables dans le monde. Je parle de contenus dans la e-santé, la e-éducation, la e-agriculture, le e-commerce, des solutions locales que nos jeunes africains peuvent développer pour répondre aux problèmes de l’Afrique, avec le soutien des Etats. Mais pour cela il faut former nos jeunes et cela nous amène à notre troisième priorité qui est celui de la formation des africains aux nouvelles technologies. Au final, il faudra bien créer les millions d’emplois qu’il manque à notre jeunesse si l’on veut stopper les flux d’immigration et ne plus voir nos jeunes se noyer dans la Méditerranée. C’est la raison pour laquelle nous allons lancer plusieurs initiatives en faveur de l’entrepreneuriat des jeunes durant la conférence Transform Africa qui se tient à Kigali du 10 au 12 mai, avec plusieurs hackathons dont une compétition.

Quels sont les plus gros freins au développement de l’internet en Afrique ?
L’Afrique a le plus fort taux de croissance du secteur internet depuis 2012. Principalement parce que l’internet s’utilise de plus en plus sur le téléphone portable, or l’on dénombre presque 1 milliard de téléphones portables à ce jour en Afrique. Mais ce développement de l’internet ne va pas assez loin, et les retards s’accumulent à cause tout d’abord des coûts excessifs de la “data”. On a beau dire que la classe moyenne africaine augmente, pour le panier moyen, le prix de l’internet en Afrique est exorbitant par rapport à l’Europe ou d’autres régions du monde. Ensuite, les pays africains ne construisent pas suffisamment de “data centers”. Pour réduire les coûts facturés aux consommateurs, il faut rapprocher les données du marché africain. Pour cela, Smart Africa, va aider les Etats africains à créer une dizaine de grands “data centers” souverains d’ici 2022.

Comment l’Afrique peut rivaliser face aux autres champions du numérique que sont la Chine ou la Silicon Valley ?
Nous avons atteint 1 milliard d’habitants vivant sur le continent africain. Si nous voulons que ce milliard d’individus soit connecté, allons-nous importer 1 milliard de tablettes, de laptops, de smartphones ? N’est-il pas indispensable que l’Afrique commence à se donner les moyens d’attirer les industries numériques sur son territoire, pour que les équipements internet, les logiciels, les produits “hardware” soit produits dans les pays africains ? La révolution numérique africaine ne se fera pas sans une nouvelle révolution industrielle. Et cela commence par la création d’un marché numérique commun, parce que 54 États africains qui se tournent le dos ne parviendront jamais individuellement à être suffisamment attractif pour attirer des investissements industriels massifs et créateurs d’emplois. Nous n’avons pas les économies d’échelle suffisante en l’état actuel et tant que nous serons divisés et sans vision panafricaine, nous allons rester de purs consommateurs. Unis, nous aurons un marché substantiel aux yeux des investisseurs internationaux qui justifiera la mise en place d’infrastructures, d’usines de montages, d’unités de fabrication, etc.

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