Tunisie : la monnaie en circulation atteint un pic historique à 25,5 milliards de dinars

Tunisie : la monnaie en circulation atteint un pic historique à 25,5 milliards de dinars

Tunisie : la monnaie en circulation atteint un pic historique à 25,5 milliards de dinars

La monnaie en circulation en Tunisie franchit un cap historique à 25,5 milliards de dinars

Chapô : Selon les derniers chiffres de la Banque centrale, la masse monétaire a connu une croissance rapide, augmentant de près de 3 milliards de dinars depuis fin 2024. Cette hausse record, portée par l’économie informelle et la défiance bancaire, pose un défi de taille aux autorités monétaires.

Une croissance rapide de la liquidité dans un contexte inflationniste

Les chiffres officiels publiés par la Banque centrale de Tunisie (BCT) le 24 septembre 2025 sont sans appel : la monnaie en circulation, composée des billets et pièces, a atteint un niveau inédit de 25,555 milliards de dinars. Cette accélération marque une nette progression par rapport aux 22,6 milliards de dinars enregistrés à la fin de l’année 2024, soit une injection supplémentaire d’environ 3 milliards de dinars en seulement neuf mois. Cette expansion intervient dans un climat économique national encore marqué par des pressions inflationnistes persistantes.

L’économie informelle et la défiance bancaire, moteurs de la hausse

Plusieurs facteurs structurels expliquent cette envolée de la monnaie fiduciaire.

Le poids de l’ombre : une économie informelle vorace en cash

Le premier d’entre eux est l’importance de l’économie informelle. Celle-ci, qui repose presque exclusivement sur les transactions en espèces, pèserait près de 40% du PIB tunisien, soit approximativement 70 milliards de dinars, selon les estimations de l’Institut tunisien des études stratégiques.

Inclusion financière : le grand retard
La confiance limitée des Tunisiens envers le secteur bancaire traditionnel est un autre levier puissant. Les données de la Banque mondiale (2024) sont éloquentes : seulement 37% de la population dispose d’un compte bancaire. Ce taux chute à 29% pour les femmes et 32% pour les personnes à faibles revenus, illustrant un profond problème d’inclusion financière. Cette « préférence pour le liquide » est également accentuée par des pics saisonniers, comme les périodes de rentrée scolaire et universitaire, qui génèrent des retraits massifs.

Le dilemme de la Banque centrale : liquidité, inflation et informalité

Cette situation place la BCT face à un dilemme complexe. L’institution doit en effet jongler avec trois objectifs souvent contradictoires :

Satisfaire la demande croissante de liquidités des ménages et de l’économie.

Contenir l’inflation, qui s’est établie à 5,2% en août 2025.

Éviter qu’une masse monétaire trop expansive ne vienne stimuler davantage le secteur informel, au détriment de l’économie régulée et des recettes fiscales.

Une lente transition vers les paiements dématérialisés

Malgré cette dépendance au cash, la Tunisie amorce une transition vers des moyens de paiement alternatifs. Les données de la BCT du 16 septembre 2025 révèlent une évolution significative des habitudes.

L’usage des lettres de change a connu une hausse spectaculaire de 155% (2,1 millions d’instruments).

En revanche, le recours aux chèques a chuté de 66,8%, signe d’une défiance envers cet instrument.

Les virements ont progressé de 9,7%, représentant 37,6 milliards de dinars, une tendance qui reflète une lente migration vers des modes de transaction plus sécurisés et adaptés aux besoins d’une économie moderne.

Cette mutation des paiements apparaît comme une lueur d’espoir pour les autorités, qui voient dans la digitalisation des transactions un levier essentiel pour formaliser l’économie et mieux en contrôler les flux.

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