La Turquie étend son influence en Afrique grâce aux ventes d’armes et aux accords sécuritaires
Outre la diplomatie et les outils de soft-power comme les organisations religieuses ou humanitaires, Ankara mise sur les ventes d’armes et les accords de coopération dans le domaine de la sécurité pour renforcer son influence économique en Afrique.
Les ventes d’armes et les accords sécuritaires constituent de nouveaux vecteurs de l’influence turque en Afrique, a estimé l’Institut allemand des affaires internationales et de sécurité (Stiftung Wissenschaft und Politik/SWP) dans un rapport daté de juin 2022.
Ce rapport révèle qu’Ankara a plus que quintuplé ses exportations d’armes vers l’Afrique en une année. La valeur de ces exportations est passée de 82,981 millions de dollars en 2020 à 460,6 millions de dollars en 2021. Cette impressionnante hausse démontre l’intérêt croissant des pays africains pour les armes de fabrication turque, et plus particulièrement pour les drones, les véhicules blindés, les systèmes de capteurs électro-optiques, les systèmes de surveillance, les véhicules de déminage et les fusils d’attaque.
Ankara a aussi signé des accords de coopération dans le domaine de l’industrie d’armement avec plus de 25 pays africains, dont le Niger, le Rwanda, le Sénégal, le Congo, le Mali et le Nigeria. Ces accords prévoient notamment des transferts de technologies militaires et le développement de capacités de production conjointes.
L’Institut allemand des affaires internationales et de sécurité, qui conseille le Bundestag et le gouvernement allemand sur les questions de politique étrangère et de sécurité, a également révélé que la Turquie a signé depuis 2017 des accords portant sur la formation du personnel des forces armées avec 20 pays africains (Algérie, Burkina Faso, Djibouti, Gabon, Gambie, Ghana, Guinée, Côte d’Ivoire, Libye, Madagascar, Mali, Mauritanie, Niger, Nigeria, Rwanda, Sénégal, Somalie, Soudan, Tanzanie et Tunisie).
Certains de ces accords portant sur la formation des diverses unités des forces armées (police, gendarmerie, garde-côtes, armée) ont permis à la Turquie d’installer discrètement des centres de formation permanents dans deux pays africains, en l’occurrence la Somalie et la Libye.
Des attachés militaires turcs dans 19 pays africains
Les accords relatifs à la formation débouchent souvent sur l’acquisition d’équipements militaires turcs. En 2020, la Turquie a, par exemple, formé plusieurs dizaines de policiers kenyans dans le domaine de la lutte contre le terrorisme. Une année plus tard, les forces armées kényanes ont annoncé l’acquisition de 118 véhicules blindés conçus pour résister aux engins explosifs improvisés auprès du groupe turc Katmerciler pour 70 millions $.
Au total, 37 accords de coopération dans les domaines de la sécurité ont été signés entre la 19è puissance économique mondiale et 30 pays africains. Dans la plupart des cas, ces accords vont au-delà des programmes de formation des forces armées nationales pour englober des volets de coopération technique ou scientifique.
En 2014, le groupe naval turc Barbaros qui compte deux frégates, une corvette et un navire de ravitaillement a accosté dans 25 ports africains. Outre la participation à des exercices navals, ce groupe opérationnel a participé à des activités de lutte contre la piraterie dans la mer Rouge, le golfe d’Aden, la mer d’Oman et les régions adjacentes.
Ankara a par ailleurs accru sa participation aux missions internationales de maintien de la paix en Afrique. Elle a notamment contribué à des missions onusiennes au Mali, en République centrafricaine, au Congo, en Libye, au Soudan, au Sud-Soudan et en Somalie. Des attachés militaires turcs sont également en poste dans 19 pays africains, dont le Nigeria, l’Ethiopie, le Ghana, le Mali, l’Algérie, Djibouti, le Sénégal, le Kenya, l’Afrique du Sud et le Maroc.
« La politique étrangère turque en Afrique combine désormais sécurité et économie, deux volets qui se renforcent en quelque sorte mutuellement », conclut le rapport, qui recommande à l’Union européenne (UE) d’envisager des partenariats avec la Turquie pour améliorer l’efficacité de ses missions militaires déployées sur le continent.
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